Iaroka est une forêt de 3300 hectares située près d'Andasibe, elle est contiguë à celle de Maromizaha, de 1880 hectares, il s'agit donc d'un immense massif forestier, le dernier de la région d’Andasibe où on peut encore voir l’imposant Eulophiella roempleriana. Une association villageoise nommée V.O.I. Iaroka (V.O.I. = Vondron'Olona Ifotony, communauté de base) d'une cinquantaine de membres a décidé de protéger cette forêt et a obtenu un contrat de gérance de l'Etat Malgache (voir aussi Ils protègent les orchidées, aidons-les !).
En 2023 l’association villageoise a bénéficié d’une aide de la Fondation Biotope (Fondation Biotope pour la biodiversité - Biotope, l'entreprise de l'écologie) pour des travaux de reboisement et de gardiennage. En effet la pression sur la forêt est énorme et il faut patrouiller régulièrement, surtout pendant la période des feux en octobre-novembre. Les patrouilles sont mixtes, c’est-à-dire composées de villageois et de gendarmes, et mènent à des arrestations lorsque, comme cette année, des pilleurs sont pris sur le fait.
Plusieurs nouvelles espèces d’orchidées ont déjà été observées par le passé dans la forêt, et au moins trois autres ont été découvertes en juillet 2023, juillet n’étant pourtant pas une période très favorable. Une espèce rare, Bulbophyllum mangenotii, a aussi été remarquée pour la première fois. Un Aeranthes très intriguant nous a posé problème, ses fleurs blanches étant peu communes dans le genre.
Le port est dressé, ce qui élimine Aeranthes peyrotii déjà vu dans la région, et les inflorescences pendantes peuvent être ramifiées. Aucune espèce déjà décrite ne semblait correspondre. En novembre 2023, coup de tonnerre dans la revue Orchids de l’American Orchid Society, Johan Hermans et Landy Rajaovelona décrivent Aeranthes bigibbum, c’est bien elle ! Ils l’ont trouvée au même endroit, la forêt de Iaroka. Voici donc une nouveauté dont la survie ne tient qu’à la protection de cette forêt.
On espère que d’autres espèces pourront être prochainement décrites, la difficulté étant d’obtenir les permis de récolte, de transport et d’export. Ces démarches assez lourdes et coûteuses viennent d’être faites pour la forêt d’Ambodiriana (www.adafam.org) grâce à un don de l’American Orchid Society, avec la collaboration du Missouri Botanical Garden, du Parc Zoologique et Botanique de Tsimbazaza, et les efforts coordonnés de la présidente de l’ADAFAM Chantal Misandeau et de Véronique Lavergne qui prospecte sur place. Les collectes ont commencé, rigoureusement proportionnées à l’abondance des espèces, pour des études morphologiques et des analyses d’ADN. Plusieurs publications devraient suivre. Bien plus petite que Iaroka avec seulement 240 hectares, la forêt d’Ambodiriana abrite pourtant au moins 110 espèces, chiffre en augmentation constante.
On voit par ces deux exemples que la conservation favorise la connaissance, et vice-versa ! Saluons aussi les collaborations internationales qui sous-tendent ces actions.
Jean-Michel Hervouet