Qu'est-ce qu'un hybride d'orchidée ?
L'hybridation d'orchidées consiste à croiser des espèces ou des genres de plantes différentes afin de créer des hybrides en général non fertiles. Dans la nature les orchidées s'hybrident spontanément (grâce à l'intervention d'un même insecte visitant plusieurs espèces de fleurs). La majorité des orchidées hybrides proposées actuellement sur le marché sont des hybrides de Cymbidium, Phalaenopsis, Cattleya, Epidendrum, Paphiopedilum, Miltonia, Dendrobium et Oncidium.
Souvent boudés des collectionneurs, les hybrides sont néanmoins de très belles plantes dont le croisement a été étudié pour la longévité et la beauté des fleurs.
Les hybrides sont aussi souvent plus faciles à cultiver car ils ont été étudiés pour s'adapter facilement en intérieur. Les hybrides sont de véritables créations scientifiques et artistiques qui demandent de la patience chez son créateur ; il s'écoule entre trois et dix ans entre la pollinisation croisée et la mise sur le marché de la plante.
Aujourd'hui des milliers d'hybrides d'orchidées sont créés chaque année à partir de deux, voire cinq genres différents (ou même davantage). Les noms sont déposés sur la liste Sander des Orchidées hybrides à la Royal Horticultural Society. Un tiers des hybrides a été répertorié par l'horticulteur Sander dès 1906. De nombreux hybrides sont néanmoins restés sans nom et ne sont listés nulle part. Aujourd'hui beaucoup d'hybrides sont produits et vendus anonymement sur les marchés du monde entier satisfaisant un public amateur de plantes exotiques. On compte près de 100 000 hybrides enregistrés depuis 150 ans. Le nom des hybrides est généralement formé de la contraction du nom de ses parents (comme Laeliocattleya) ou créé selon le nom de l'hybrideur (comme Vuylstekeara créé par Charles Vuylsteke).
L'histoire de l'hybridation
Les débuts de l'hybridation furent très difficiles. On cria à l'accouplement contre nature. Même l'hybridation naturelle n'était pas reconnue. Il faudra attendre le 18e siècle pour que les premiers hybrides naturels soient décrits, mais non encore reconnus. C'est seulement en 1726 que le botaniste Sébastien Vaillant identifie les hybrides naturels Orchis purpurea x Orchis militaris et Orchis purpurea x Orchis simia. Mais ils seront reconnus comme de vraies espèces et non pas comme hybrides bien qu'on leurs reconnaissaient des similitudes avec leurs parents. En 1786 Dominique Villars découvre l'hybride Gymnadenia conopsea x Nigritella nigra mais il le décrit et le nomme comme une nouvelle espèce Orchis suaveolens.
Les travaux d'Edouard Timbal-Lagrave permettront enfin dès la fin du 19e siècle la reconnaissance des hybrides naturels chez les orchidées indigènes. Pour les orchidées tropicales, la notion d'hybride a eu aussi beaucoup de mal à se faire accepter. John Lindley fut le premier à soutenir l'existence d'hybrides naturels chez les orchidées tropicales. Le premier hybride naturel reconnu fut Phalaenopsis intermedia (Phalaenopsis amabilis x Phalaenopis rosea). A la fin du 19e siècle, on reconnait alors 44 hybrides naturels d'orchidées exotiques.
En ce qui concerne l'hybridation artificielle, il faut attendre encore pour voir fleurir le premier hybride. Le 25 octobre 1856 s'ouvre la première fleur hybride artificielle créée par James Dominy : Calanthe dominii (Calanthe furcata x Calanthe masuca). C'est le début du marché de l'hybride. Les plantes hybrides deviennent même plus recherchées que les espèces naturelles et se vendent beaucoup plus chères.
Chronologie
1856
James Dominy créé le 1er hybride d'orchidée, Phalaenopsis intermedia (Phalaenopsis amabilis x Phalaenopis rosea).
1859
John Harris fait fleurir Cattleya hybrida (Cattleya intermedia x Cattleya guttata). James Dominy créé le 1er hybride intergénérique : Calanthe veitchii (Limatodes rosea x Calanthe vestita).
1869
Veitch créé le 1er hybride Paphiopediulm : Paphiopedilum harrisianum (Paphiopedilum villosum x Paphiopedilum barbatum).
1878
Le 1er hybride Dendrobium naît : Dendrobium dominianum (Dendrodium linawianum x Dendrobium nobile).
1880
Masdevalia chelsoni (Masdevalia amabilis x Madevalia veitchiana) fleurit.
1881
Alfred Edmond Bleu créé le 1er hybride français, Cattleya calummata (C. intermedia x C. aclandiae) en 1881. Pionier de l'hybridation française, il ne cesse de créer des hybrides de Cattleya, Cypripedium, Laelia et Miltonia jusqu'en 1901.
1885
Roch Philippe Auguste Jolibois hybride le genre Cypripedium. Cypripedium Mademoiselle Alice Garyot fut son premier grand succès en 1885.
1887
Charles Baptiste Maron est le meilleur obtenteur avec plus de 250 hybrides. Il obtient son 1er hybride, Calanthe x darblayiana en 1887, puis en 1890, il obtient Cattleya x dubiana. Il va ainsi hybrider Cattleya, Cypripedium, Laelia et Miltonia jusu'en 1926.
1891
Georges Mantin obtient Cypripedium olivetense, son 1er hybride en 1891, et Cattleya mantinii l'un des plus beaux hybrides français de l'époque, en 1894.
1893
Octave Opoix obtient son 1er hybride en 1893 avec Cypripedium Madame Octave Opoix. Il hybridera de nombreux Cypripedium jusqu'en 1919.
1903
Auguste Gilbert Emile Marie Dallemagne débute l'hybridation vers 1894 et créé Shombocattleya spiralis en 1903.
Jusqu'en 1914
Horticulteurs ou jardiniers au service de riches amateurs d'orchidées et simples amateurs créent eux aussi de nouveaux hybrides tels que Cypripedium Sallieri (Cypripedium insigne x Cypripedium villosum), Cattlyea Mathoniae (Cattleya mossiae x Cattleya lueddemaniana), Brassocattleya Debrie-Lachaume (Cattleya warneri x Brassia digbyana), Zygopetalum Perrenoudii (Zygopetalum intermedium x Zygopetalum gauteirii) ... On peut citer Louis Cappe, Léon Duval, Georges Magne, Noël Bernard, Lesueur, Auguste Marcoz, Léon Perrin, Bert, Garden, Régnier, Raymond Faroult, Combet, Biessy, A. Godefroy-Leboeuf, Henri Vacherot, Maurice-Etienne Lecoufle, Isidore Leroy et Maurice Jacob chez Rothschild, Debille, Charles Schwartz, Gaston Bultel, Charles Page, Eugène Poirier, Gauthier, Louis Gaud, Hardier, Muller, Sadarnac, C. Beranek, Joseph Ginot, Henri Graire, Eugène Boulet, M. Du Tremblay du May, Ragot, Cour-Montagne, Moreau, Boullet, Fanyau, Cleverly, Oberthür, Perrenoud, Octave Doin, Edouard André, MM. Orpet, Joly, Lemonier, Régnier, Le doux, Treyeran, Finet, Linden ...
1914-1940
Les frêres Maron, Marcoz, Graire, Rothchild Perrin, Guttin, Gratiot, Blevenec, Bert, Enault, Potin, M.H.N.P. Mattan, Régnier, Belin, Cuny, De Smet, Beranek, Boussac, Denis, François, Gaud, Ginot, Le Doux, Lebaudy, ont enregistré de belles productions. Parmi elles pour n'en citer que quelques-unes : Brassocattleya Cuba (Brassocattleya gallieni x Brassocattleya douaumont), Vanda Gilbert Triboulet (Vanda coerulea x Vanda tricolor). C'est la naissance aussi du 1er hybride quadrigénérique Brassavola x Cattleya x Laelia x Sophronitis.
Jusqu'à nos jours
Michel et Maurice Vacherot, Marcel et Maurice Lecoufle orchidéistes français ont largement contribué à l'amélioration des connaissances orchidéennes et à la production d'hybrides. S'appuyant sur les travaux de Georges Morel qui en 1961 met au point la 1ère orchidée obtenu par méristème (c'est-à-dire créée à partir de cellules d'une plante), Michel Vacherot réalise des cultures de protocrome à partir de méristèmes. C'est alors le début de la multiplication clonale industrielle, qui va remplacer l'obtention longue d'hybrides par graines, entraînant une production en masse d'orchidées à travers le monde. Pour ne citer qu'un ou deux exemples d'hybrides Vacherot ou Lecoufle, citons Vuylstekeara Rutilant (Vultylstekeara Fragonard x Oncidium Pradier) et Papiopedilum Pinocchio (Paphiopedilum glaucophyllum x Paphiopedilum primulinum). On voit apparaître aussi le croisement quintuple connu sous le nom Vacherotara : Broughtonia x Cattleya x Epidendrum x Laelia x Sophronitis.
Conclusion
Lorsqu'un croisement a été réussi, il est cloné en grand nombre. La méthode du clonage, culture par méristèmes, est largement utilisée dans le monde. Ce processus, plus rapide et plus facile à pratiquer que les méthodes de semis par graines, permet une reproduction fidèle des parents.
Cette augmentation en masse du nombre d'hybrides a sans conteste permis de détourner l'attention des espèces sauvages et réduit ainsi l'arrachage sauvage des orchidées dans leur habitat naturel.